BRUXELLES, 1er et 2 septembre 2023
Salle de la plate-forme bruxelloise en santé mentale
15 rue de l’association – 1000 Bruxelles. 4ème étage.
PROGRAMME
Participation en présentiel
Possibilité de participer à la journée de samedi en visioconférence sur inscription
Inscription sur le lien : inscription séminaire du CEDEP – Bruxelles – 1 & 2 septembre 2023
Chaque conférence dure 30 mn et est suivie de 30 mn de discussion
Vendredi 1er septembre
18h30 Pot d’accueil
20h 00 Introduction, Bruno Gravier, Président du CEDEP, psychiatre, Yverdon, Suisse
20h15 : projection du film «Qu’est-ce que je fais là »de Paule de Muxel et Bertrand de Soliers, suivie d’une discussion avec le réalisateur (à confirmer) et des participants du film.
Samedi 2 septembre
9h-11h Conférences introductives
Discutantes: Claire Gekiere, psychiatre Aix-les-Bains, France et Véronique Nahoum-Grappe, anthropologue, Paris.
Marc Hunyadi, philosophe, Louvain, Belgique « Colonisation numérique et vie de l’esprit »
Parce que nous devons toujours davantage passer par le numérique pour la moindre de nos actions, celui-ci tend à remplacer toutes nos relations naturelles avec le monde – monde des objets, des personnes, des institutions – par des relations techniques. Fait anthropologique de première importance ! On abordera ici quelques-unes de ses conséquences sur la vie de l’esprit
Christian Laval, sociologue, Lyon, France « Souci écologique et santé mentale dans un monde troublé »
L’addition d’une pandémie sans fin, d’une guerre aux portes de l’Europe, la destruction des sols et des nappes phréatiques, la multiplication des méga-feux et des inondations, bref la dévastation de la beauté du monde et des cultures n’est pas assimilable à un effondrement total tel que la collapsologie l’annonce. Elle procède par à-coup dans des temps et des lieux localisés, atomisés, seulement lorsque les points de ruptures affectifs sont atteints et dépassés (gilets jaunes, insurrections diverses, racisme systémique, violences genrées). En dernier ressort, le topos énergétique qui fait tenir différents collectifs de lutte se construit avant tout radicalement dans nos forts intérieurs par l’expression de nos désalignements affectifs entre résignation, révolte, éco-colère et éco -anxiété. D’où l’actualité de la rencontre entre souci écologique et attention soutenue à la santé mentale de ceux, de plus en plus nombreux qui survivent et résistent au quotidien.
11h00-11h30 : Pause
11h30 -12h30 L’évolution des droits des patients dans une société de plus en plus sécuritaire
Discutants : Bruno Gravier, psychiatre, Yverdon, Suisse, et Antoine Masson, psychiatre, Bruxelles
Aikaterini Nomidou, avocate, experte OMS et présidente de la fédération des familles grecques, «l’évolution des droits des malades psychiques en Grèce au cours de ces trente dernières années depuis la loi de 1992 »
Tout chercheur théorique tentant d’obtenir un aperçu des patients psychiatriques en Grèce sera indubitablement satisfait: la législation grecque est non seulement moderne mais aussi une des législations les plus avancées d’Europe, les psychiatres partagent toujours le même avis sur l’évaluation clinique, les procureurs s’accordent toujours avec les psychiatres, les patients et les proches ne s’opposent jamais, les tribunaux ne rejettent jamais les applications de placement involontaire, les patients ne doivent pas se présenter au tribunal, ils n’ont jamais un avocat qui les représente, ils n’ont jamais recours à un psychiatre indépendant et ils n’attaquent pas les jugements de placement involontaire.
Le système de justice s’est avéré incapable de garantir les droits de l’homme atteint d’un trouble mental. La loi 2071/1992 relative aux droits et à la protection des personnes hospitalisées en raison de troubles mentaux tendait à mieux garantir les droits des patients hospitalisés. Toutefois, trente ans après, les droits fondamentaux des patients sont toujours brutalement bafoués. Le patient hospitaliséé sous contrainte n’a pas de droits ni comme patient ni comme détenu.
12h30 13h30 Repas sur place
13h30-14h30 Sciences et subjectivité, nul ne serait ignoré par la science
Discutants: Jean De Munck, philosophe et sociologue, Louvain, Belgique, et Paul Arteel, juriste, Belgique
Dominique Deprins, statisticienne, Louvain et Bruxelles, Belgique : « Big Data : quand l’affect est devenu l’outil pour prédire »
La trame du monde des data est une mise en données du monde. C’est un monde éminemment statistique au point que la statistique en devient la médiation obligée, instruisant un nouveau rapport au réel. L’objet du Big Data, c’est la donnée elle-même, valeur de la variable manipulée par les TI, que la multitude hyper-connectée génère, spontanément et à foison, pour sa vie économique, sociale et affective.
Le Big Data est une affaire de prédiction, propriété fondamentale du vivant ; il inaugure un nouveau paradigme prédictif. En recourant aux algorithmes auto-apprenants de l’IA, sa visée est le réel lui-même. Par ses prédictions, le Big Data est capable d’objectiver le désir en tant que voyage affectif singulier des hommes connectés de la multitude. Le monde statistique des données massives en devient un monde de différentiation et de singularisation qui seront traitées en tant que telles.
La statistique gouverne. Quels sont ces nouveaux agencements politiques par la donnée ? Il sera question de micropolitiques – politiques affectives – par les prédictions inédites du Big Data. La statistique est également un instrument de pouvoir. Comment cette volonté prédictive dessine-t-elle les contours d’un nouvel instrument de pouvoir, un « ontopouvoir » (B. Massumi), – un pouvoir affectif – qui se prolonge au-delà du biopouvoir (M. Foucault) ?
Ces nouvelles rationalités statistiques substituent-elles leurs propres sources de signification et de volonté à nos actions, nous désubjectivant ? Dans ce monde désormais très outillé d’un vaste réseau en extension continue de machines humaines et non-humaines interconnectées, on peut s’interroger sur le sort réservé à une santé mentale prédictive, « sans médecine, ni malade » (G. Deleuze).
14h30-15h00 : pause
15h00-17h00 : Trouble dans la maladie mentale-Illness trouble : identité ou stigmate ?
Discutants : Paul Arteel, juriste, Belgique, et Eric Messens, psychologue, Bruxelles, Belgique.
Gerald Deschietere, psychiatre, Bruxelles « Comment faire avec le temps dans nos pratiques soignantes »
La pratique de la psychiatrie dans le monde contemporain se codifie essentiellement en fonction d’une tarification horaire, défendue d’ailleurs par un certain nombre de syndicats de médecins. Une analyse de la dimension du temps dans les pratiques soignantes tentera d’indiquer les basculements de la psychiatrie vers une approche où s’estompe la distinction entre cette discipline médicale et le domaine de la santé mentale, probablement au détriment des personnes historiquement considérées comme les plus nécessiteuses de soin. A travers l’analyse de différents lieux d’exercices de la psychiatrie, sera également questionné une pratique psychiatrique dépourvue de contact entre les usagers et les psychiatres. A mesure de la dilution de la psychiatrie dans le vaste champ de la santé mentale, et en constatant les effets positifs de celle-ci sur la destigmatisation des usagers de la psychiatrie, ne sommes-nous pas en train de produire à contre-courant une psychiatrisation ubiquitaire de la société ?
Intervention de représentants d’association de patients. « Stigmatisation et identité, évolutions récentes, du point de vue du patient et des associations de patients ».
17h00-17h15 conclusions
Bruno Gravier : brève synthèse, perspectives pour le CEDEP.
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Comité d’organisation : Bruno Gravier, Claire Gekiere, Eric Messens, Gérald Deschietere, Dominique Deprins, Paul Arteel, Christian Laval, Véronique Nahoum-Grappe, Ulrich Kobbé.